André Longuet des Diguères, Chef du bureau du Droit de la Consommation à la Direction Régionale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes DGCCRF Paris

DGCCRF/21/08/2002

LE REGLEMENT EXTRAJUDICIAIRE DES LITIGES DE CONSOMMATION

La difficulté d’accès à la justice fait que les consommateurs pensent tout d’abord à utiliser d’autres moyens pour régler les différends qu’ils ont avec les professionnels.
Le premier moyen non juridictionnel consiste, pour le consommateur, à adresser directement sa protestation au professionnel dans l’espoir d’un règlement amiable. Cependant les négociations directes ne peuvent régler tous les litiges de la consommation. Le consommateur a donc intérêt à s’adresser à une instance qui s’entremette entre le professionnel et lui.
Ces instances sont soit d’initiative étatique, soit d’initiative privée.

1. La Boîte postale 5000
Le dispositif de la Boîte Postale 5000 a commencé à fonctionner en 1976 et a été étendu à l’ensemble des départements en 1977.
Il s’agit d’une adresse unique, au chef-lieu de chaque département, qui canalise les plaintes des consommateurs.
Le fonctionnement de la BP 5000 est assuré dans chaque département par la DDCCRF. Toutes les lettres adressées à la BP 5000 (l’adresse BP 5000 suivie du chiffre du département suffit) parviennent à la DDCCRF locale qui se charge de leur orientation.
Les litiges pouvant donner lieu à un règlement amiable sont traités par la BP 5000 du département où se trouve le siège de l’entreprise avec laquelle le consommateur est en désaccord. Lorsque le consommateur s’est adressé à la BP 5000 de son département alors que le siège de l’entreprise est situé dans un autre département, la lettre est transmise à la BP 5000 de ce département.
Le courrier est réparti entre les associations de consommateurs et les organisations professionnelles qui participent au fonctionnement de la BP 5000 du département ( le nombre, la nature des associations intéressées, les modalités pratiques de répartition varient d’un département à l’autre).
Une démarche est ensuite effectuée, par l’association de consommateurs ou l’organisation professionnelle chargée de l’affaire, auprès de l’entreprise concernée, en vue d’aboutir à une solution amiable du litige.

2. Les Commissions de conciliation
Lorsque la médiation primaire par le biais de la BP 5000 échoue, le litige est soumis à une commission de conciliation fonctionnant auprès de chaque BP 5000. Cette instance est présidée par le directeur départemental de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, assisté d’un représentant des consommateurs et d’un représentant des professionnels. Des assesseurs sont choisis par le président, selon la nature des litiges à régler, parmi les personnes désignées par les organisations représentatives des consommateurs et des professionnels. Dans la quasi-totalité des cas, la médiation primaire aboutit à un règlement amiable qui peut s’accompagner d’un remboursement ou d’une indemnisation au profit du consommateur.
Ces procédures (BP 5000 et commission de conciliation) n’excluent pas la possibilité d’une action en justice ultérieurement dirigée contre l’entreprise. Elles fonctionnent de façon très inégale selon les départements.

3. Les Commissions de Règlement des Litiges de Consommation (CRLC)
Un arrêté du 20 décembre 1994, modifiant celui du 21 février 1987 relatif aux comités départementaux de la consommation, institue au sein de chaque comité, une commission de règlement des litiges de la consommation. Ces commissions ont été mises en place, à titre expérimental, dans neuf départements, à la fin du premier trimestre 1995.
Présidées par une personnalité indépendante, et comprenant des assesseurs représentant respectivement les consommateurs et les professionnels, elles mettent en œuvre une procédure de conciliation de type paritaire. L’objectif consiste à favoriser le règlement des litiges de consommation dans le cadre d’une procédure souple, facile d’accès et rapide.
Actuellement, deux CRLC sont en fonctionnement :
L'une à Perpignan dans les Pyrénées Orientales qui bénéficie de l'expérience, en matière de règlement amiable des litiges, notamment transfrontaliers de la Maison Catalane de la Consommation de Perpignan.
L'autre à Rennes en Ille-et-Vilaine qui bénéficie du vivier de compétence que représente le milieu universitaire rennais.

4. Le conciliateur de justice
Un décret du 20 mars 1978, complété par un décret du 13 décembre 1996, a institué des conciliateurs de justice.
Nommés, dans toutes les villes de quelque importance, par ordonnance du premier président de la Cour d’appel, ils sont choisis parmi les personnes offrant des garanties de compétence et d’impartialité.
Les conciliateurs de justice ont pour mission de faciliter, en dehors de toute procédure judiciaire, le règlement amiable des différends portant sur les droits dont les intéressés ont la libre disposition. Leur compétence est donc plus large que les seuls différends opposant des consommateurs à des professionnels.
Le conciliateur est saisi par les parties. En cas de conciliation, il peut être établi un constat d’accord signé par les intéressés et le conciliateur. Si les parties en expriment la volonté, le juge d’instance peut donner force exécutoire à l’acte exprimant cet accord.

5. La médiation pénale
Une loi du 4 janvier 1993 a institué la médiation pénale.
Le procureur de la République, préalablement à sa décision sur l’action publique et avec l’accord des parties, peut décider de recourir à une médiation s’il lui apparaît qu’une telle mesure est susceptible d’assurer la réparation du dommage causé à la victime et de mettre fin au trouble résultant de l’infraction. Le médiateur désigné par le procureur a pour mission de chercher, avec l’auteur et la victime, un règlement amiable au conflit qui les oppose. Si l’auteur de l’infraction accepte la solution proposée par le médiateur, il échappe aux poursuites pénales. Des médiations pénales ont été créées dans de nombreuses villes. Elles peuvent avoir à connaître des litiges entre professionnels et consommateurs, puisque les infractions au droit de la consommation sont souvent de nature pénale.

6. Le Médiateur de la République
Il intervient dans les litiges opposant des particuliers à l’administration, un service public ou une collectivité locale (mauvais fonctionnement de ses services, décision injuste, refus d’exécution d’une décision de justice).

7. Les médiateurs des services publics
EdF-GdF, la SNCF, la Poste et la RATP ont un médiateur. Par contre, leurs décisions n’ont pas de caractère obligatoire. Dans la pratique, les recommandations des médiateurs sont suivies par les deux parties.


Il existe des médiateurs en assurance et en crédit. Les particuliers peuvent faire appel à un médiateur indépendant lorsque les procédures internes ont échoué. Leur intervention est gratuite. En fait, il n’y a pas un mais plusieurs médiateurs pour les diverses compagnies, selon les organisations professionnelles.
Il existe aussi des conciliateurs dans le domaine commercial. Beaucoup de fabricants, producteurs de marques, produits commerciaux, etc... indiquent la mention « Service Consommateurs », avec une adresse postale.
Il existe aussi des commissions paritaires de médiation pour régler les litiges entre copropriétaires et syndics, auprès du syndicat national des agents de voyage, du syndicat des entreprises de vente par correspondance, du centre d’information bancaire.

1. L’action transfrontalière de la DGCCRF
La DGCCRF et ses homologues européens ont institué en 1992 un réseau de coopération transfrontalière. Son but principal est de développer les échanges d’information sur les produits non conformes ainsi que sur les litiges transfrontaliers.
La coopération entre les administrations implique aussi des enquêtes conjointes, des rencontres et des échanges entre fonctionnaires, des mises en place de procédures nouvelles, des formations communes...
Pour agir efficacement, 8 directions régionales de la DGCCRF assurent la coordination des relations bilatérales avec chaque pays : Lille pour le Royaume-Uni, l’Irlande et la Belgique ; Metz pour les Pays-Bas et le Luxembourg ; Strasbourg pour l’Allemagne et l’Autriche ; Lyon pour la Suisse ; Clermont-Ferrand pour le Danemark ; Montpellier pour l’Espagne ; Bordeaux pour le Portugal ; Marseille pour l‘Italie et la Grèce.
Grâce à ce réseau, une solution rapide aux problèmes détectés a pu, souvent, être trouvée.

2. Le réseau international de l’OCDE
A l’initiative de la délégation française, une procédure de règlement amiable des litiges transfrontières de consommation a été proposée aux membres du Réseau International de Contrôle de la Commercialisation. Bien que le Réseau ait pour objectif principal de faire cesser les pratiques commerciales transfrontières douteuses en faisant jouer la coopération administrative de ses membres sur une base informelle et volontaire, les membres du Réseau ont eu à s’occuper du règlement de litiges individuels.
Aux difficultés habituelles que rencontrent les consommateurs lésés, s’ajoutent, lorsqu’il s’agit de litiges transfrontières, les problèmes de l’éloignement et de la langue.
Le dispositif proposé a pour objectif de faciliter, à l’occasion d’une réclamation, le dialogue entre un consommateur et un professionnel situés dans deux pays différents en brisant notamment la barrière linguistique, (le Réseau ne dispose que de deux langues officielles, l’anglais et le français) mais sans intervention active des correspondants du Réseau entre les deux parties.
Son fonctionnement est simple : un formulaire simplifié qui identifie le consommateur, le professionnel et la réclamation du consommateur est envoyé par le correspondant du pays du consommateur au correspondant du pays du professionnel. Ce dernier l’envoie au professionnel concerné, après l’avoir éventuellement traduit dans sa langue. Le professionnel notifie, sur le formulaire, son acceptation ou son refus de la demande du consommateur puis retourne le formulaire au correspondant de son pays. Celui-ci envoie le formulaire ainsi rempli au correspondant du pays du consommateur qui, après l’avoir éventuellement traduit dans sa langue, informe le consommateur des suites données à sa réclamation.

3. Le réseau communautaire de règlement extrajudiciaire des litiges de consommation ou réseau EJE
Dans le cadre de son plan d’action sur l’accès des consommateurs à la justice et le règlement des litiges de consommation, la Commission européenne a pris, le 30 mars 1998, une recommandation tendant à favoriser l’utilisation des procédures extrajudiciaires de résolution des litiges de consommation.
En lien direct avec cette recommandation, la Commission a proposé la création d'un réseau communautaire d'organes de règlement extrajudiciaire des litiges de consommation.
Il s'agit de la création dans chaque État membre d'une structure unique d'information, d'aide, de conseil et d'orientation des consommateurs (le Centre d’Échanges).
C'est dans ces conditions que le consommateur d'un pays pourra, par l'intermédiaire de cette structure implantée dans son État :
- connaître l'instance de règlement extrajudiciaire compétente dans un autre État membre pour examiner le litige qui l'oppose à un professionnel de ce même État ;
- avoir recours aux bons offices de l'instance de règlement extrajudiciaire dudit pays ;
- bénéficier, le cas échéant, d'une aide et/ou d'un conseil pour établir sa réclamation dans les formes requises.
Pour parvenir à ce résultat, il est prévu que les Centres d’Échanges implantés dans les États membres coopèrent entre eux pour transmettre, en vue de son instruction, la plainte du consommateur.
Les Centres d’Échanges ainsi que les différents organes de règlement extrajudiciaire des litiges de consommation devraient être réunis dans un réseau communautaire.
Cette initiative a fait l'objet d'une résolution, adoptée par le Conseil le 25 mai 2000.